Le colonel Moran, surnommé « le Pourfandeur », est revenu des Indes après de nombreux périples à travers la jungle, la savane, pour satisfaire un instinct de chasseur, et pas que de fauves.
Malgré son grade dans l’armée, ses nombreuses exactions et son caractère à la limite de la moralité l’a fait quitter les Indes.
Il est revenu en Angleterre avec des ressources diminuées par un long voyage (ainsi que par certains excès).
C’est alors qu’il entend parler d’un certain professeur Moriarty, un véritable génie des mathématiques qui mènerait les bas fond de Londres à la baguette - des gérants de pub aux policiers, nombreux sont ceux sous sa coupe - propose à Moran de devenir son bras droit en charge de la partie homicide de la Firme.
Meurtres, cambriolages, supercheries et manipulations, voiçi les activités de ces deux compères maléfiques.
Dans cette revisite aussi drôle que remplie d'aventure, préparez vous à des aventures palpitantes et rocambolesques! Des personnages malveillants, cruels, imprévisibles, violents, libertins... Bref que des qualités! Ces maîtres du mal des rues londonnienne vont nous faire découvrir la façe cachée de Londres. Un beau clin d'oeil aux aventures de Scherlock Holmes, mais d'autre petit clin d'oeil sont au rendez-vous...
Récit encré dans son époque et collé à la peau du personnage
Je ne le fait pas souvent, mais je tiens à le mettre en avant, j’ai beaucoup apprécié le travail sur la couverture et les pages du livre. L’extérieur à un aspect steampunk avec des décorations proches des illustrations dans les années 1920-1930 un peu art déco, industriel. En plus les tranches des pages sont argentées. Le look est assez sympa ! A l’intérieur du livre, l’écriture et soignée et élégante au début de chaque chapitre, ou au début d’une nouvelle intrigue. La présentation ne définit absolument pas la qualité du livre, mais c’est toujours appréciable d’avoir cette première approche du livre d’une manière esthétique qui essaye de nous faire entrer dans un univers.
Kim Newman revisite œuvre de Sir Arthur Conan Doyle de manière plutôt originale et sans précédent. Il a déjà essayé de maintenir un style de phrase, des tournures, des manières de dire les choses qui nous situent dans l’époque dans laquelle se passe l’action, et également pour être fidèle à son prédécesseur. Cependant, il tranche avec ce dernier de manière singulière, avec un récit à la première personne. Le colonel Moran, nous raconte ces aventures et celles de son ami avec parfois un ton sarcastique, grossier, rustre, mais qui colle parfaitement avec le personnage, et qui apporte au récit une touche sarcastique, d’humour et parfois de légère vulgarité qui tranche avec son époque et les situations.
L'hommage à Sir Arthur C.D. est évident, surtout avec le titre "le chien d’Uberville" qui nous fait pensé , bien sûr, au "Chien des Baskerville", une malédiction pesant sur le nom de sa famille, un chien mystérieu. Une chasse palpitante!
Jekill et... JEKILL
Nos deux protagonistes ont des personnalités bien particulières, et incroyablement mauvaises. Mais c’est agréable d'avoir un récit avec une vision moins manichéenne des choses et au final plus proche de notre réalité (même si on préfère avoir plus de moralité que ces deux là).
Le Colonel Moran, est un militaire, mais il n’en a même pas l’allure et ni la moralité. Violent, orgueilleux, homme à femme, irrespectueux, roublard, doté d’une moralité d’un genre particulier. Il a un sens de l’honneur, certes, mais qui lui est propre (un honneur de chasseur de l'époque, ou d’homme qui aime chasser).
Le Professeur lui est un personnage troublant, car il est difficile à cerner, mais aussi par son aura, sa présence malsaine et intimidante. Malgré son air reptilien, son teint laiteux voir chétif, il transpire l’orgueil, le sadisme, bref ce n’est pas un personnage que l’on apprécie, mais qui a un côté fascinant comme tous les méchants. C’est un fin calculateur qui nous surprend dans le récit par la manière dont tout ce qui se produit (de bon comme de mauvais), est toujours savamment planifié et étudié par ce dernier. Il manipule tout le monde, et personne n’en a véritablement conscience. Moran façe à cela, se sent véritablement inférieur à Moriarty et ne fait que constater le fossé qui les sépare.
Franchement on ne s'attache à aucun d'eux, on ne les comprend pas, que se soit dans leur réflexion ou leurs motivations, mais cela ne nuit pas au récit et nous empêche pas de dévorer le livre.
Histoire ou histoires???
Cette fois, nous ne suivrons pas les aventures de Sherlock Holmes, qui est nommé le « grand échalas » dans ce roman. Nous allons suivre les aventures du professeur Moriarty et de son acolyte aux mœurs et au tempérament redoutable, le colonel Moran, dit « le Pourfendeur ». Nous suivons donc les aventures de Jekill et Jekill qui passent leurs journées à terrifier les rues de Londres.
On commence l’histoire de manière originale, avec un récit sur une bande de banquiers qui appréciaient de louer leur service à tous les plus grands malfrats de leur époque, cette histoire dont on ne comprend pas le but nous ramène à notre époque. Il s’avère qu’à notre époque, le président de la Banque Box Brothers fait l’incroyable découverte d’un coffre-fort au nom du célèbre Professeur Moriarty. Ce dernier contenait une lettre et un manuscrit écrit par un certain colonel Moran. Il fait la lumière sur les actions de la Firme du Professeur Moriarty et sur son influence sur la criminalité londonienne pendant des années.
Nous assistons à une histoire parsemée de plusieurs petites histoires. L’histoire principale parle des années que le colonel a passé auprès du professeur. Les petites histoires, quant à elles nous détaillent certaines des missions qui ont été confiées à la Firme et qui ont le plus marqué leur histoire commune. Les missions sont particulières, elles vont du meurtre d’un chien démoniaque, au cambriolage d’une banque, en passant par le rapt de relique maudite. Le plus intéressant, c'est que des parallèles sont fait avec des personnages connus dans d'autres œuvres, alors essayer de les trouver ;p
Une de mes histoires préférées est celle avec la célèbre Irène Adler qui va entraîner le professeur et le colonel dans le vol d’une peinture pour faire chanter une famille royale. Moriarty sort les grands moyens, et créer une émeute dans une partie de la ville pour voler le tableau. Cependant c'est l'une des rares fois où le professeur se fait doubler, car on connaît tous la malice d’Irène Adler. Elle retourne la situation a son avantage, ce qui lui a valu par la suite un surnom peu flatteur de la part de Moriarty.
Vous allez aussi découvrir un grand ennemi du Professeur Moriarty qui n’est pas ce cher Scherlock mais Sir Nevil Airey Stent. C’est le cadet de Moriarty, mais ces travaux ont été plus reconnus, et pour ne pas en rajouter, Stent discrédite les écrits de son confrère. Une telle arrogance ne va pas rester impunie. C’est un chapitre bien particulier, car une partie ne nous est pas narré pas le colonel, mais via le journal de Stent (Moran en a volé les pages). Le ton et le style diffèrent complètement, car on est face à un personnage ambitieux, organisé, fier, sûr de lui, et un peu snob. Cette histoire est le stratagème le plus impressionnant, tordu, spectaculaire et incroyablement bien manigancé par Moriarty. Même nous pendant la lecture, avons des doutes sur les limites de l’interaction entre Moriarty et les faits étranges entourant Sir Nevil. Comme toujours, tout et tout le monde est manipulé par ce cher professeur.
Le récit banalise de manière drôle l’atmosphère morbide, sombre du quotidien de nos protagonistes, on balaye toute notion de bien et de mal, seul le développement de la firme prime, et on n’essaye pas de se poser des questions existentielles. Seul le profit, l’argent, les intérêts, le crime, voir l’orgueil intéresse Moriarty. Le meurtre, le crime sont évoqués comme des technologies, une science à développer pour conquérir le monde moderne et faire des choses encore plus époustouflantes (d'un point de vue criminel bien sûr :p).
J'espère que cela vous a donné envie de découvrir l'univers de Kim Newman, et qu'en plus, vous avez des envies de replonger dans vos classiques avec Sir Arthur Conan Doyle. Alors pour ce récit, je mettrais un.... 8/10.
Moriarty, Le chien des d'Uberville - 2015, Bragelonne, Kim Newman