Mélina est une jeune trentenaire à qui la vie sourit peu. Elle travaille en tant que serveuse dans un bar miteux du fin fond du Texas. Sa maison, qui est sa maison d’enfance, n’est que le reflet de son existence, terne, bancale, poussiéreuse.
Mélina n’est pas séduite par tout ce qui l’entoure, mais c’est ainsi, c’est sa vie et cela lui convient. Un jour, après un ménage routinier, le téléphone sonne…
La vie de Mélina Flores devient alors moins monotone, la Société d’Annonce de la Mort l’a prévenu que dans 1 semaine, elle va mourir.
Elle peut cependant payer pour avoir de plus en plus d’information sur les circonstances de sa mort prochaine, mais le prix est toujours de plus en plus élevé.
Quel prix sera-t-elle prête à payer ? Elle peut fuir, elle peut essayer de comprendre, mais elle ne pourra pas échapper à sa mort. Elle va vivre en quelques jours, plus d’aventures, de bouleversements que pendant 30 années.
Je remercie l’auteur qui m’a contacté via la plateforme simplement pro, j’étais un peu hésitante à lire ce livre au départ. J’ai du mal avec les thèmes difficiles comme celui-ci, qui nous conduisent vers trop d’introspection, je n’aime pas être déprimée quand je lis un livre. Mais la dimension légèrement fantastique, les personnages et leurs blessures m’ont finalement emporté avec eux.
Un style soigné, mais des descriptions trop longues
J’ai été impressionnée par le style de l’auteur, on sent qu’il y a une personne de très érudite derrière, tant le style est soigné, imagé, et le vocabulaire riche. Parfois, c’est même un peu trop développé, les descriptions sont trop longues, trop lourdes au détriment de l’action. Même les dialogues peuvent s’avérer long, long, longggggg… Ça casse le rythme de lecture, ça nous faisait parfois un peu sortir du récit ou perdre le fil.
La dimension fantastique est quant à elle subtilement intégrée au récit, cela nous paraît presque normal, cela ne modifie pas l’histoire, c’est complètement intégré, à tel point qu’on a peur de croiser ces monstrueux hommes en noir.
L’Amérique que l’on découvre n’est pas sous son plus beau jour, des supérettes de station essence, des motels miteux aux clients un peu pathétiques, des campements hippies qui vivent leurs derniers jours, des masures délabrées près des chants de maïs. Une Amérique, un peu fanée, un peu triste, aussi proche de la mort que nos personnages. Et pourtant, les descriptions de cette Amérique ont un côté tellement beau dans toute cette morosité.
Des thèmes difficiles, et salvateurs
Malgré le thème lourd, difficile à aborder, quand on lit ce récit, on est heureux. Heureux par ce que l’on a envie de savourer chaque instant. Le fait d’apprendre la date de sa mort, est un événement perturbant et en même temps, c’est le déclic, qui peut rendre aux yeux des autres le fait que la vie est précieuse, et éphémère.
Ce récit de mort, est un hymne à la vie. Mélina va vivre connaître les joies de l’amitié, de l’amour, mais aussi ces déceptions, son impulsivité liée à la nouvelle qu’elle a reçu bouleverse son existence et ces choix. La plongée dans les souvenirs d’enfance est un moment d’introspection difficile. A la fois ces instants nous ramènent à notre sujet de fond, la mort, mais également à une notion plus vague, le destin, le sort… Comme si tout était prévu, chaque être ne maîtrise pas tous les éléments de son histoire, peu importe sa durée.
Alors d’un côté, on a envie de profiter de la vie, de ces instants éphémères qui nous semble durer une éternité. Et en même temps, il y a une rébellion, une colère profonde face à ces décisions, cette destiné qui n’est pas maîtrisée. Mais aussi face à l’homme, ces faiblesses, ces défauts, qu’est ce qui vaut le coup ?? D'ailleurs, les différentes phases du deuil sont explorées dans ce récit : la colère, le déni, le choc, la résignation pour certains… A voir si Mélina ira dans la phase d’acceptation.
D’autres thèmes vont faire leur apparition dans ce récit comme la violence dans le cadre intime. Raconter avec de la pudeur et une certaine frayeur par Marshall, avec un dédain et ironie par Lou. Le sujet est difficile à lire et à comprendre tant cela paraît tellement insensé, inconcevable. Autant, on se dit, des gars qui annonce la mort… pourquoi pas ! Des hommes qui battent leur femme, des pères qui violentent leurs enfants, c’est difficile d’admettre que cela existe encore et c'est bouleversants.
Des personnages aux blessures profondes
On rencontre une Mélina morose, empreinte d’une certaine lassitude, d’une mélancolie. Dès qu’elle va recevoir la nouvelle et comprendre la gravité de la situation, on est face à une jeune femme impulsive, à l’écoute de ses émotions, et très en colère. Parfois, elle m’agace, elle prend certaines choses trop à cœur, et on a envie de lui crier, mais pense à toi non de xxxx tu meurs dans une semaine.
Marshall Sawyer, cet homme est difficile à cerner. Il peut être compréhensif, doux prévenant, puis incroyablement froid, méchant, sans états d’âme. Ce qui a le don d’énerver Mélina. Cet oiseau libre, applique parfaitement l’enseignement de ce livre. Il vit au jour le jour, sans se préoccuper du lendemain, ou des autres. Mais avec Mélina, les choses vont être différentes, elle perturbe ses habitudes.
Lou, une asiatique au passé tumultueux, elle est impulsive, irrationnelle, un côté un peu enfantin. Elle s’attache tout de suite à Mélina sans se poser de question, mais elle peut faire preuve d’impressionnante erreur de jugement et de beaucoup d’instabilité.
Ce qui réunit ces trois personnages, c’est la présence dans leur vie d’épreuves difficiles, de violence, de la solitude, de la mort, de l’impulsivité lié à un farouche désir de liberté. Ils vont tous s’apporter quelque chose ou être bien plus qu’un battement d’ailes dans une vie. Leur intervention est déterminante. Et je les trouve tellement vrais dans leurs qualités et défauts, si authentique.
Des personnages en fuite perpétuels, ils courent après une liberté qui ne semble jamais être vraiment là, car au bout du chemin tous auront la même fin. Un récit qui fait réfléchir, qui ouvre les yeux autant qui peu glacer le sang à cause de cette danse macabre. Seul bémol, les descriptions et monologues extrêmement longs et perturbent la lecture et le rythme du récit. Un excellent 7,5/10 pour moi.
La mort devant soi, La fureur de l’aube, Ophélie Curado, autoédition, 2017
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