Isabelle est une jeune fille impétueuse et curieuse de connaître tous les secrets du monde qui l’entoure.
Mais ce qui va développer sa fascination, son amour pour les dragons, c’est la découverte d’un animal minuscule, un lézard, une luciole… Peu importe, cette petite créature fascine Isabelle.
Elle veut tout savoir, son anatomie, ce qu’ils mangent, où ils vivent, comment ils se reproduisent…
La petite fille curieuse du monde va laisser place à une jeune femme, éduquée, apprêtée, prête à se marier qui a quelque peu oublié qui elle était.
Mais son mariage et sa rencontre avec un Lord féru de dragon et d’aventure, vont réveiller ces passions d’antan.
Dans les contreforts des montagnes Vystranienne, elle va participer à une expédition scientifique sur l’étude des dragons, une expédition qui va changer sa vie et donner naissance à Lady Trent, la naturaliste, experte en dragon, mondialement connue.
Je suis très contente que la maison d’édition l’Atalante est acceptée de m’envoyer ce livre ! J’avais déjà repéré cette maison d’édition il y a un an ou deux, j’appréciais particulièrement les détails et la qualité de leur couverture de roman. Ils ont été très gentils, car ils m’ont laissé le choix du livre que je souhaiterais lire, et il faut avouer que ce roman me faisait de l’œil depuis bien trop longtemps. J’adore cette couverture, et le résumé, qui peut résister à cette amoureuse de la connaissance, ce Jules Verne au féminin !!
Amateurs de dessin ou pas, vous apprécierez non seulement la couverture, mais également les illustrations du récit, qui nous présente des dragons avec des formes, des tailles très variés, ce qui nous montre bien qu’en matière de dragon, on peut toujours faire preuve de créativité. Des illustrations de Todd Lockwood, qui a travaillé sur Donjons et Dragons notamment.
Chaque début de chapitre nous est présenté avec quelques phrases nous indiquant les événements majeurs qu’y vont arriver, je ne suis jamais très fan de ce parti-pris, mais ça ne nous dérange pas forcément dans notre lecture. Par la suite, le récit se compose en différentes parties structurant le récit et les différentes phases importantes des jeunes années de la vie d’Isabelle.
Loin des codes du genre
J’avoue qu’au départ, j’étais un peu perdu dans le temps. En fantasy, il y a des codes vestimentaires, des avancées technologiques, des modes de transport qui nous font nous situer dans une époque: médiéval, steampunk… On fait une sorte de parallèle. Mais dans cette histoire cela a été difficile à déterminer. Mais peu à peu l’auteur nous donne des éléments, on peut faire un parallèle avec notre époque victorienne. J’aime bien le côté courtois, polis, pris dans les convenances et le « politiquement correcte », qui apporte un côté calme, posé au récit.
L’influence européenne dans son récit n’est pas négligeable. L’Angleterre a fortement influencé l’auteur pour les paysages de la contrée natale d’Isabelle, le Scirland, ainsi que pour ce qui est de leur attachement aux bonnes manières. En Vystranie, j’ai dénoté quelques influences russes, ou des régions du Caucase, dans les vêtements, les modes de vie, la géographie, le climat et quelques coutumes. Mais également égyptienne, lorsque les ruines d’un ancien peuple, la civilisation draconienne - des adorateurs de dragon, sont découvertes (des constructeurs ingénieux, des précurseurs dans beaucoup de domaine).
Le récit se complaît dans une ambiance très anglaise, bonnes mœurs et bonnes manières, mais il y a également une autre ambiance, celle de la recherche, de l'exaltation scientifique et on va se retrouver pris dans des événements qui vont vite dépasser notre groupe de scientifique. Mais l’action re-pointe le bout de son nez, quand Isabelle a une nouvelle idée en tête. Toutes les péripéties ne sont pas le fait de l’impétueuse Isabelle, et quand un semblant d’élément surnaturel ou d’enquête pointe le bout de son nez, l’auteur maîtrise parfaitement son intrigue et cela apporte beaucoup de rythme dans l’histoire.
Les récits de ce genre que j’ai pu lire m’ont habitué à des univers plus sombres, avec beaucoup d’horreur. Ici, ce n’est pas le cas, il y a plus de douceur, moins de violence et une sorte de familiarité. Si bien qu’on ait l’impression que des dragons vont débouler au coin de la rue. Il est difficile de classer ce livre dans un cadre bien précis dans la Fantasy tellement il transcende les sous catégories du genre.
La façon dont l’auteur traite ce roman, façon mémoire, cela est tout à fait nouveau pour moi. Mais je trouve que cela renouvelle vraiment le genre et nous fait appréhender la fantasy autrement qu’avec des guerriers bourrus, des aventuriers bravant le monde pris dans des quêtes effrénées ! Non seulement, nous avons une héroïne, mais elle nous raconte elle-même son histoire !
Revisite du traitement de l’espèce saurienne en Fantasy
Comme je le dis souvent, un récit fantasy avec une carte du monde, c’est souvent de bon augure !! Cela traduit d’un univers riche, construit, la promesse d’une histoire intéressante, parfois complexe avec toutes ces nouvelles choses qui nous sont étrangères. On sent que quand Isabelle est enfant, le monde entame un tournant, des découvertes se font de plus en plus, des scientifiques entament de nombreuses recherches, le monde de Lady Trent n’a pas encore révélé tous ces secrets.
Si en plus on y rajoute des dragons, le cela devient intriguant. Il faut dire que dans beaucoup de récit se sont des créatures tellement mythique que personne n’en a vu depuis des siècles, et l’angle d’attaque de l’auteur est particulièrement intéressant. D’habitude on a des chasseurs de dragons, des maîtres de dragon, des partenaires, mais là on a une scientifique, une naturaliste. Le point de vue est complètement différent, il y a le côté scientifique, anatomie. Mais également sociologique je dirais, leur rapport entre eux, la reproduction, la hiérarchie, leur comportement avec les autres espèces.
Les dragons dans cette histoire, ont des formes variées, le premier que va rencontrer Isabelle est un lucion. C’est une espèce tellement petite qu’on les apparentait à des insectes. Mais vous aurez votre quota en poursuivant votre lecture avec les dragons loups ou les veurs des rochers.
Il est difficile de renouveler le genre lorsqu’il s’agit des dragons, et je trouve que c’est vraiment original de traiter le sujet sous une forme scientifique. Les considérer avant tout comme une espèce comme une autre, un animal plutôt qu’un mythe une légende dont on sait si peu. Beaucoup de description, de détails, de précisions, qui contribuent à développer notre curiosité, dans un esprit de scientifique et le tout dans une ambiance assez raffiné.
De la jeune femme à la scientifique de renom
Nous rencontrons dans un premier temps Isabelle, future Lady Trent, dans une préface, cette histoire est le premier tome de ces mémoires, et donc on s’attend à découvrir notre Lady dans ses jeunes années, avant qu’elle ne s’accomplisse véritablement dans sa vocation. Cette préface nous met vraiment dans l’ambiance et nous prépare à des aventures palpitantes.
Lady Trent, une femme d’un certain âge, qui a bien vécu, a appris beaucoup de choses de la vie et fait preuve d’une perspicacité et d’un humour redoutable. Elle peut facilement se passer de certaines conventions sociales, car à son âge on ne s’offusque pas des bizarreries d’une vieille femme. Isabelle, enfant, est une fillette pleine d’énergie, curieuse, intelligente, parfois impulsive, elle ne se contente pas d’observer le monde, elle veut se faire ses propres conclusion.
Ce que j’apprécie dans la narration c’est la rédaction sous forme d’un mémoire. On ressent la pudeur d’Isabelle, qui ne s’étend pas sur ces sentiments et sa relation avec son mari. On ressent son amour démesuré, sa curiosité scientifique lorsqu’elle parle de dragon et en décrit chaque détail de leur anatomie avec une précision à toute épreuve. Les personnages secondaires, eux, sont peu développés, mais comme le dit Lady Trent, à 19 ans, jeune épouse et en pleine exploration du monde, il y a des détails auxquelles elle ne prêtait pas assez attention. C’est un peu le revers de l’écriture sous forme de mémoire, mais cela reste vraiment cohérent. J’aime beaucoup le personnage de Dagmira, elle a un tempérament aussi têtu qu’Isabelle et elles font un sacré duo ensemble. Mais c’est vraiment son mari, qui va beaucoup lui apporter. Il tempère son impétuosité, l’invite à réfléchir et bien utiliser ces capacités. C’est vrai que parfois, il a tendance à la surprotéger, j’apprécie des tempéraments plus doux pour contrebalancer avec des héros plus imprévisibles.
L’action est légère, peu présente, mais l’évolution de la jeune Lady, son parcours suffise à nous tenir en haleine dans cette histoire. En plus il y a la promesse de découvrir des dragons, et voir comment Lady Trent va renouveler la conception qu’on les autres naturalistes du monde. Son côté impulsif nous encourage à poursuivre cette lecture et voir qu’elle bêtise va-t ’elle déclencher.
Une fantasy historique, qui s’inspire de notre monde, ou de créatures de légende, tout en bouleversant les codes et traitement du genre. La narration dans un style soutenu, quasi victorien, autobiographique, peu de rythme dans l’intrigue et pourtant cela fonctionne tellement. Grâce à Isabelle, cette jeune femme qui au nom de son rêve va faire tout son possible pour sortir des codes que lui impose la société, alors un 10/10 pour, moi car c’est un vrai coup de cœur.
Une Histoire Naturelle des dragons, Mémoires par Lady Trent, Marie Brennan, édition l’Atalante, 2016