Il y a des sujets que l’on appréhende d’aborder avec son enfant. La mort, la naissance, la fabrication des bébés, pourquoi la guerre existe…
La jeune Fanchon elle va devoir faire face à la mort, à la dépression, à la maladie des choses bien abstraites pour une si jeune petite fille. C’est avec le décès de son père que sa vie bascule, sa mère n’est plus que l’ombre d’elle-même, sa sœur à d’autres priorités, son frère et bien trop petit pour comprendre ce qu’il se passe.
Heureusement Mamie est là, Fanchon aime beaucoup passer du temps avec sa mamie, même le voisin Jean-Marc peut s’avérer être un bon compagnon de jeu, un peu grognon certes. Mais plus que tout, elle aime rêver, s’imaginer en fantomette, cavalant sur les toits et punissant les méchants !
Histoire « écrit/parlé »
L’auteur a choisi de mettre en avant un personnage particulier par chapitre, le nom du personnage introduit le personnage que nous allons suivre, sans discontinuer de l’histoire. L’originalité vient du fait que l’auteur remodèle sa plume en fonction de l’identité de chaque personnage, toujours en restant à la troisième personne. Un ton vif, impulsif, décousu comme les pensées ou les émotions d’un enfant quand on suit les aventures de la petite Fanchon. De la spontanéité, un soupçon de rébellion pour la jeune Chloé. Un ton nettement plus mature, vivace et réfléchie pour la grand-mère. Un côté bourru, râleur, non dénué de tendresse pour Jean-Marc. Cela apporte une tonalité particulière au récit, un dynamisme dans la lecture, une réalité, une vérité qui ressort des personnages. Et le récit nous paraît alors encore plus vrai. Cependant on ne dénote pas de véritable histoire dans ce roman, c’est plutôt vague, comme des souvenirs, c’est accentué par un côté « écrit/parlé ». L’important est plus ce suivre l’évolution de Fanchon face à toutes ces épreuves et ces changements.
Si via les personnages on peut vivre la difficile réalité de la perte d’un être cher, d’autres thèmes sont mis en avant. La dépression, la maladie, l’abandon, mais toujours avec subtilité, sans que cela devienne oppressant. D'autre thème sont plus subtile par exemple l’amitié naissante entre Fanchon et Jean-Marc, ce dernier voyant la petite à l’abandon, par le manque d’affection de sa mère et également le manque d’autorité parentale, fait office d’un oncle chez qui Fanchon peut prendre un goûter et jouer. La relation adulte/enfant est ici mise en avant, car rapidement certains voisins doutait que la relation ne fût qu’uniquement platonique. Malgré le côté profondément difficile du sujet, c’est avant tout traité avec simplicité, humour, décence.
Récit difficile, ponctué d’humour
La jeune Fanchon ne va pas être épargnée la mort de son père, de son chien, une mère absente et dépressive, une mamie qui s’épuise. Comprends elle ce qui lui arrive, pas complètement, principalement parce que l’on voit avant tout une petite fille terriblement seule et pas toujours complètement consciente des réalités du monde. C’est particulièrement flagrant lors du décès de son chien, Fanchon est particulièrement dans le déni, ne comprends pas ce qu’il se passe, où est son chien, pourquoi on fait cela. On est face à un esprit éveillé qui est conscient du monde qui l’entoure mais qui n’en a pas les clefs et qui manque cruellement de repère. On a face a nous une petite fille qui est tout simplement perdue et seule.
J’avais peur de lire un récit difficile, de faire face à un sujet si sensible. Au final c’était un moment bien étrange… La mort du père est au final peu évoqué, comme si elle n’avait pas eu lieu. Mais pourquoi en parler ? L’auteur nous montre bien l’impact d’un tel événement sur une famille, une fillette à l’abandon, une mère désœuvrée, une grand-mère qui n’a pas le temps d’essuyer ses larmes car malgré la fatigue et la tristesse elle porte sa famille à bout de bras. Cette grand-mère nous apporte un véritable souffle dans notre lecture, ces traits d’humour et ces leçons loufoques sur la vie sont vraiment agréables à lire. Tout comme les pérégrinations de Fanchon sous les traits de la justicière fantomette.
Je m’attendais à une lecture difficile, mais au final malgré les thèmes plutôt durs qui ont été abordés, on en ressort avec un esprit en réflexion mais également avec une certaine légèreté. J’ai quelques réserves que le style d’écriture et le manque d’une histoire, d’un enjeu dans ce roman. Ce n’est pas forcément un roman que je lis avec plaisir, ce n’est pas un coup de cœurs, mais cela nourrit mon esprit de réflexions nouvelles, sur la vie, ma façon de voir les choses, et au final je l’ai dévoré. Au final, les livres ça sert à cela également, à nourrir l’esprit, alors un 7/10 pour cette bonne nourriture
Fanchon, Véronique Deprêtre, ONLIT éditions, 2019
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